Les
docteurs à la portugaise
- Au Portugal, du
fait des mentalités parfois encore attardées,
et de la volonté du maintien de cette distinction
verbale de la part des intéressés,
beaucoup de portugais se sentent flattés si on les appelle
par leur titre.
-
- Cet aspect y est très
marquant. Les Portugais sont en général
il est vrai, d'une nature polie et courtoise. Mais
le fait qu'un portugais qui possède un diplôme
supérieur tienne à ce qu'on l'appelle
Monsieur le Docteur (Senhor Doutor), ne tient pas de la courtoisie, mais du
besoin superficiel de distinction.
-
- Le bout de vos pieds à frétillé
avec l'enseignement supérieur ? Alors,
vous êtes docteur.
-
- Ceux qui ont obtenu un doctorat à l'université,
souhaitent cependant que sur les correspondances, figure le
titre de "Doutor" en toutes lettres, afin
de se distinguer des autres, qui n'ont droit qu'à
un "Dr".
-
- Dans l'enseignement secondaire,
les profs se font appeler "Setor", qui
est une contraction de "Senhor Doutor"
(Monsieur le Docteur). C'est curieux, rigoureusement exact ! :-)
-
- Les ingénieurs,
instituteurs, et autres architectes, se font quant
à eux, appeler par le titre de leur profession.
Rarement on les appellera "Monsieur".
-
- Ceci est autant constaté
dans le langage verbal, que dans les écrits.
La presse se complaît d'ailleurs à
maintenir ce rituel d'actualité. Rarement
un article de presse ou une interview,
fera référence à
personne notoire ou pas, sans le fameux
titre "Docteur" ou "Dr".
En y prêtant
attention, on peut lire ou entendre prononcer ce titre partout,
à tout va...
-
- Ceux qui entretiennent cette coutume
contribuent autant à son enracinement
que les concernés eux-mêmes.
A chaque fois que le titre est ainsi
mentionné, le Portugal recule
d'un pas.
-
- Pourquoi étale-t-on ainsi
pompeusement son niveau d'études
? On aurait aussi bien pu faire allusion
à ses goûts littéraires,
à son équipe de foot préférée,
à la taille de son sexe, à
son niveau en Anglais, à la pointure
de ses chaussures, à son niveau
au tenis, voir même,
pourquoi pas à ses compétences.
- Mais ce n'est pas le cas. Le niveau
d'études (et social) prime, et se doit d'être
étalé.
-
- On établi ainsi une distinction,
entre "ceux qui en sont",
et ceux "qui n'en sont pas",
générant d'emblée
un "fossé" entre deux
personnes.
-
- C'est assez drôle, voir risible,
de voir que dans un pays se voulant
maintenant à priori moderne, des coutumes
de ce genre, établissant délibérément
et d'emblée, des distinctions
entre les individus selon leur niveau
d'études, puissent encore exister.
Paradoxe
- Il est d'ailleurs paradoxal
de constater que dans un pays où l'on entend
le mot "docteur" autant prononcé
ou écrit, le système
de santé soit loin d'être à
la hauteur !
-
- Si au 21è siècle,
dans un pays européen, cette volonté
d'un autre âge est maintenue, cela est bien
évidemment du au désir des protagonistes,
qui tentent de maintenir ainsi cette habitude ancrée
dans les moeurs.
-
- Serais-ce pour exhiber leurs
qualités humaines ou professionnelles
réelles, (qui ne sautent pourtant pas aux
yeux avec un titre), ou pour étaler pompeusement
leur niveau d'études et leur rang social,
en essayant de rehausser l'importance qu'ils n'ont
pas forcément ?
-
- Beaucoup de ceux qui tiennent à
se faire appeler "Docteur"
(y compris dans leur vie courante),
arborent ainsi dèrriere un titre
pompeux, un air sérieux souvent
inversement proportionnel à leur
réelles compétences, rendant
ainsi véritable la citation de
Montesquieu "La gravité
est le bouclier des sots".
-
- Dire
qu'au 16e siècle, Montaigne disait
déjà à peu de chose près
que :
- "sur le plus grand trône du monde,
on n'est jamais assis que sur son cul ! " :-)
-
- Beaucoup de ces "Docteurs à
la portugaise",
se sont souvent miraculeusement
ou de façon opportuniste retrouvés
à des postes-clés dans la
politique, les affaires, à la
tête d'institutions ou d'entités
les plus diverses. Parfois, malgré
leurs compétences plus que douteuses
ou leur innéficaité flagrante,
ils s'accrochent avec force à
leur poste, uniquement maintenus grâce à
leurs réseau relationnel de "docteurs
à la portugaise" et... à
leur titre.
-
- Ceci empêche le Portugal de
progresser, et le pays a encore beaucoup
de progrès
à faire pour accéder aux
marches qui engendreront la vraie modernité,
celle de l'ouverture des mentalités.
-
Contribuer
à ce que cela cesse
- Espérons que
Portugalmania "l'Agitateur du Portugal" avec des articles comme celui-ci lus par
des centaines de milliers de personnes
francophones s'intéressant chaque
année au
Portugal, ainsi que par des dizaines
de milliers de Lusodescendants de culture
française, puisse, en mettant "les
pieds dans le plat", contribuer
à générer une prise de conscience, à
faire reculer les habitudes
d'un autre âge, et à faire
vaciller les volontés tenaces
des "Docteurs à la portugaise",
et de ceux qui désirent continuer
à tirer le Portugal vers l'arrière.
-
- Le but de ce commentaire
n'est bien sûr pas d'établir
une simple critique facile et stérile
basée sur un constat réel, mais au
contraire, de contribuer activement
à faire en sorte que les mentalités
évoluent, et qu'elles ne soient
plus un frein. Le Portugal doit avancer,
à son rythme, mais dans le bon
sens.
-
Le
mieux est d'en rire...
- Désormais, quand vous verrez
sur un article, ou entendrez par exemple
un journaliste
interviewer une personnalité quelconque
en évoquant son titre de "Docteur"...
Pensez à Portugalmania, et surtout
ne vous apitoyez
pas... Riez-en plutôt
de bon coeur.
Dr.
Mario Pontifice ;-)
Portugalmania - L'agitateur du Portugal - mars
2002
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