Analyses / Interviews Portugal
Banques
portugaises
A.L.
Cela concerne-t-il toutes
les banques portugaises
et un
nombre important de
biens immobiliers ?
M.P.
- Oui, pratiquement
toutes les banques portugaises
sont
concernées, à des degrés
plus ou moins importants.
Toutes les banques portugaises
proposent des prêts
immobiliers.
Quant au nombre de biens
immobiliers concernés, il est en
augmentation constante,
du fait de la croissance
de déclarations de faillites
personnelles ou d'impossibilité
pour de plus en plus
de familles, de pouvoir
faire face à leurs obligations.
Il
y a actuellement 150
mille familles portugaises
en retard
de paiement de leurs
mensualités de remboursement.
Et d'après la Banque
du Portugal, chaque
jour, 25 nouvelles familles
se retrouvent à la rue,
en devant céder leur
habitation pour cause
d'impayé. Après avoir
étudié tous les recours
possibles, ces familles
ont donc été contraintes
de céder leur bien immobilier
à l'établissement bancaire
prêteur.
Personne
ne peut aujourd'hui
dire quelle sera la
véritable ampleur
du phénomène dans les
mois à venir, mais on
peut néanmoins constater
que les banques se retrouvent
avec de plus en plus
de biens immobiliers
sur les bras, et dont
elles devront se défaire, ce
qui ne manquera pas
de jouer un rôle non
négligeable sur le marché
immobilier portugais.
-
Prenons le cas de la
CGD par exemple : Concernant
spécifiquement la CGD
(Caixa geral de depositos),
il s'agit d'une banque
nationale vouée à être
vendue. Il ne s'agit
pas de privatisation,
mais de vente, désir
manifesté par l'actuel
gouvernement, qui brade
une grande partie du
patrimoine portugais
à prix de solde, afin
de répondre aux impositions
et exigences de l'UE.
Or
la CGD, (qui a d'ailleurs
la particularité d'être
le plus grand créancier
actuel détenteur de
la dette publique du
Portugal avec 6,5 Milliards
d'euros fin 2010), se
retrouve avec un nombre
important de biens immobiliers
sur les bras, récupérés
à des propriétaires
pris à la gorge. Il
va donc falloir qu'elle
se défasse au plus vite
de ces boulets.
C'est
aussi le cas pour d'autres
banques. Il n'existe
pas de situation-type
et chacune doit improviser
en fonction du contexte.
A.L.
Vous voulez dire que
ces banques vont tout
faire pour vendre rapidement
?
M.P.
- Oui, évidemment. Elles
y ont intérêt. Je dirais
même qu'elles vont y
être obligées. Elles
vont employer tous les
moyens pour se défaire
au plus vite de ces
biens qu'elles possèdent
malgré elles.
Elles
vont devoir faire preuve
d'imagination, diversifier
leurs circuits de vente,
et inventer des produits
complémentaires attractifs
afin de capter les acheteurs
potentiels au plus vite.
Car pour elles ça urge.
A.L.
Quoi d'autre ?
M.P.
- D'autre part,
le marché immobilier
portugais, même s'il
n'a pas connu de bulle,
est néanmoins surévalué
par endroits, et devra
être corrigé. Attention,
car il ne s'agit pas
d'une chute générale
du prix de l'immobilier
portugais, mais bien
d'un réajustement qui
devra être effectué
dans des villes, voire
des secteurs précis
de villes, où les prix
de certains produits
immobiliers sont nettement
surévalués par rapport
à la réalité.
L'ordre
de grandeur de cette
correction atteindra
30% voire davantage,
surtout dans des villes
comme Lisbonne. Les
propriétaires devront
à moyen, voire à court
terme, impérativement
procéder à cette correction,
c'est à dire à ré-estimer
les biens dont ils
sont propriétaires en
les révisant à la baisse.
A
titre d'exemple, la
Deco, la
principale association
portugaise de défense
des consommateurs, a
ainsi estimé qu'à Lisbonne,
les appartements de
type T1 devront descendre
en moyenne de 34%, et
les T2 de 39%.
Dans
les quartiers de Campolide
et de Lapa, la baisse
des prix devra même
être supérieure. Ainsi
les T2 du quartier de
Lapa à Lisbonne, sont
d'après cet organisme,
actuellement surévalués
de 52%. Quant aux prix
des T2 du quartier de
Campolide, ils seraient
surévalués de 54%, et
devraient donc baisser
de moitié, ce qui n'est
pas rien.
Les
appartements de type
T2 situés dans les quartiers
de Anjos, Arroios, Estefania
et Penha de França,
seraient actuellement
plus proches de leur
valeur réelle, mais
devraient néanmoins
subir une
baisse de l'ordre de
20% pour être en adéquation
réelle avec le marché.
A.L.
Et c'est ainsi partout
au Portugal ?
M.P.
- Pas vraiment partout.
Encore une fois, il
ne s'agit pas d'une
chute globale importante
et massive du marché
au sens strict, mais
de réajustements à faire
de façon sélective.
Cependant on a déjà
noté une baisse générale
globale du prix de l'immobilier
au Portugal. Sur les
12 derniers mois on
estime la
baisse à environ 7%
Il
en est de même avec
le marché immobilier
du luxe. Ce marché était
une sorte de "marché
parallèle", ne
tenant pas vraiment
compte de la réalité
du pays, car s'adressant
en grande partie à des
investisseurs ou des
propriétaires étrangers.
L'Algarve est un parfait
exemple de cette réalité.
Mais comme la crise
fait partir nombre d'étrangers
du Portugal, les biens
immobiliers de ce segment
augmentent. Augmentation
de l'offre d'un côté
et réduction de la demande
de l'autre, impliquera
là aussi une baisse
inévitable.
A.L.
Mais en dehors des
grandes villes ou du
luxe ?
M.P.
- En principe, les biens
immobiliers standards,
situés en province,
dans les villages, et
donc en dehors des secteurs
"normaux",
n'ayant pas subi d'influences
particulières ou d'effets
de mode passagers, n'ont
pas trop bougé ces dernières
années, et n'auront
donc pas à subir de
réajustement, sauf exception.
Ils
ne subiront que les
effets de la "loi
du marché", c'est
à dire une baisse relative
qui se cantonnera à
suivre la loi de l'offre
et de la demande, le
tout en période de crise
et de dévastation d'un
pays par une poignée
de politiciens aux ordres
de l'oligarchie financière
qui dirige l'UE.
D'une
manière générale, avant
d'acquérir un bien immobilier
actuellement au Portugal,
tachez de connaître
la progression de son
prix ces 10 dernières
années. Si par rapport
à il y a 10 ans, le
prix du bien a subi
une hausse qui vous
semble anormale, beaucoup
plus importante que
"le raisonnable",
et ceci sans qu'il y
ait aucune justification
extérieure réelle, c'est
que le bien immobilier
est surévalué.
Mais
quoi qu'il en soit,
il subit la loi du marché
actuel qui est en tendance
baissière.
A.L.
- Donc l'attente est
la solution ?
M.P.
- Probablement, et
ce d'autant plus qu'en
Espagne, une véritable
bombe vient d'exploser
!
A.L.
- C'est à dire ? Avez-vous
des révélations à faire
sur l'immobilier en
Espagne ?
M.P.
- Des révélations, peut-être
pas car l'information
est publique. Mais sans
doute beaucoup n'en
ont pas encore connaissance...
Suite
de l'interview
26 Oct 2012 © portugalmania.com |