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La Portugaise

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Le lendemain...

Nouveau jour, nouvel examen. Ce deuxième contrôle affiné ne laisse entrevoir aucune amélioration ni un seul soupçon d'espoir à la jeune femme, qui désormais sent que son moral penche vers une pente descendante.

- Il faut à tout prix que j'y croie, se répète-t-elle sans cesse.

- Désormais, c'est une question de temps, lui dit le médecin qui la suit, venu une fois de plus rencontrer sa patiente, et sentant qu'elle a plus que jamais besoin de renfort moral. Il faut absolument que vous vous reposiez au maximum et dormiez le plus profondément possible. Nous allons vous y aider.

Par ailleurs, poursuit-il, si on ne parvient pas à des résultats probants rapidement, je pense que l'on pourrait bientôt envisager un changement de clinique. Je viens de contacter mon confrère de la clinique "Morgada" au nord de Lisbonne, et nous avons conclu qu'un transfert pourrait probablement être profitable si les résultats du prochain examen demeurent négatifs.

- Changer de clinique ? Mais pour quelle raison ? Demande la patiente.

- Tout bêtement pour une question de spécialisation. Ils sont un peu mieux armés que nous pour tout ce qui concerne spécifiquement les yeux, et pourront peut-être envisager la situation sous un autre angle sur le plan technique. Nous n'en sommes pas encore là, mais au cas où, je vais commencer à m'occuper des aspects logistiques.

- C'est vous qui voyez, docteur ! Répond-elle avec un brin de malice dans la voix, montrant finalement au médecin que son moral a encore quelques réserves.

La jeune femme regagne alors sa chambre où l'attend une jeune infirmière qui lui administre encore quelques soins, en lui disant : "Ce petit repos ne vous fera pas de mal".

Plus tard...

- Allez, ma petite dame. On s'en va. C'est la liberté ! Dit une des deux infirmières ayant fait irruption dans la chambre.

- Déjà ? Je ne m'attendais pas à ce que ce soit si rapide, mais après tout... répond la patiente, visiblement très surprise par la soudaineté des circonstances.

- Plus vite vous changerez et mieux ce sera. Il vous reste cette journée devant vous et demain sera vraiment le grand jour, car vous arriverez au seuil où les chances d'évolution sont au point culminant. L'examen que vous ferez dans l'autre clinique demain sera donc révélateur et il faut absolument que le stress soit au minimum. Votre moral doit être bon. Il faut que vous vous décontractiez au maximum et subissiez le moins de tumulte possible. Répond une des infirmières.

Nous allons vous aider à vous habiller et à vous faire belle. Finit de dire la soignante, tandis que sa collègue se dirige vers le placard contenant les valises de la jeune femme.

- Me faire belle ? Questionne la patiente intriguée. Mais je pensais que j'allais être transférée dans une autre clinique et pas dans une boîte de nuit. Finit-elle en riant.

- Pour augmenter les chances de guérison il faut que vous vous détendiez et vous sentiez bien, afin que "la mécanique interne" ne subisse pas d'influences néfastes. Répond l'infirmière, qui poursuit...

Mieux vous vous sentirez dans votre tête mieux ce sera. Et le fait de vous sentir habillée normalement, jolie, et replongée dans la réalité même uniquement pendant le temps du transfert, ne pourra être que profitable.

De plus, poursuit-elle, vous allez arriver dans la clinique par la porte principale et allez croiser beaucoup de gens. Il faut que vous ayez une apparence correcte. Finit-elle.

- Ah bon ! Je ne m'y rends pas allongée dans une ambulance ? Questionne la jeune patiente.

- Non. Vous n'êtes pas dans un état nécessitant un transfert de ce genre. Vous vous y rendrez normalement. Ce sera bien une ambulance qui vous emmènera, mais vous serez une passagère presque normale. Finit de dire une des infirmières, tandis que la seconde aide la jeune femme à s'habiller.

- Au fond vos avez sûrement raison. C'est bien vu. Cette façon de faire doit être bénéfique pour le moral. Le fait de changer de contexte et de regoûter à un court moment de coupure, doit être positif. Répond la jeune femme, qui se retrouve peu à peu habillée de la tête aux pieds.

La patiente d'il y a quelques minutes est  désormais métamorphosée en quelqu'un d'autre. Elle a choisi de mettre sa robe préférée, une belle robe blanche à poids roses légère et printanière, finissant par des volants semblant prêts à s'envoler au moindre souffle de vent. Quelques touches de maquillage ponctuées avec minutie par les deux soignantes finissent par lui donner davantage un air de mannequin désinvolte, que celui d'une malade qui sait que la vraie sentence tombera demain.

- Qu'est-ce que vous êtes jolie ! S'exclame une des soignantes. On va aussi vous changer le bandeau sur les yeux. Tenez, celui-ci est aussi efficace et nettement plus petit. Et derrière des lunettes de soleil on ne le verra presque pas. Finit-elle, joignant le geste à la parole.

- Je trouve que tout va subitement très vite mais vous êtes vraiment adorables, dit la jeune femme, ravie de se retrouver quasiment dans une position de valide. Cet épisode la rend rayonnante et son sourire reprend tout son éclat naturel.

- Pour vos valises, vos petites affaires de toilette et les fleurs, ne vous en faites pas, nous allons nous occuper de tout ça, dit une des deux femmes en blanc. Ce seront ensuite des livreurs spécialisés qui feront le transfert. Elles arriveront à la clinique une demi-heure après vous. Ah, au fait, il faut qu'on vous prévienne. L'ambulancier qui vous emmènera s'appelle Rogério. C'est un garçon très gentil et compétent qui travaille avec notre clinique depuis des années. Il a une particularité : il est muet.

Si vous souhaitez lui poser des questions en route, il vous répondra par un "hum" pour dire "Oui" et par deux "hum" successifs pour dire "non". Ca réduit le dialogue mais ça peut vous être utile si vous avez besoin de quelque chose. Vous verrez il est vraiment gentil, et de toute façon le voyage ne durera qu'une demi-heure environ.

Les infirmières quittent alors la chambre. La jeune femme se dirige de suite à pas lents et feutrés vers la table de nuit afin d'y prendre la fameuse pièce de 2 euros qu'elle trouve relativement facilement en tâtonnant, et la faufile dans une petite poche de sa robe. S'il s'agit vraiment d'un porte-bonheur, autant l'emporter. Elle s'assoit ensuite sur le rebord de son lit attendant l'arrivée de l'ambulancier.

 

 

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