Essentiellement
concentré sur Fatima et la foi, le dialogue
s'est ainsi poursuivi un bon quart d'heure
entre la patronne du café et son client.
Antoine a maintenant regagné sa voiture
avec l'intention de se rendre à la clinique.
Quoique... se dit-il intérieurement...
En effet, elle doit encore dormir, et au fond est-ce bien
utile qu'il se rende à son chevet avant
que l'examen ait lieu ? Pense-t-il.
La fatigue générée par
sa nuit blanche le gagne de plus en plus.
Va essayer de te reposer un peu ! Se
dit-il en se dirigeant déjà vers son hôtel.
Ce petit déjeuner pris à l'extérieur m'a
un peu changé les idées, et maintenant deux ou trois heures
de sommeil ne me feront pas de
mal. Et ensuite direction la clinique !
C'est la sage résolution
qu'il vient de prendre à l'instant et qui
lui semble la plus bénéfique.
***
Deux heures
de sommeil suffisent parfois à remettre
les idées en place et à faire retrouver
de la vigueur à un corps fatigué.
Ayant complété ce court
mais bénéfique traitement par une bonne
douche généreuse, Antoine se sent désormais
dans une forme resplendissante et se
met en route pour la clinique. Quel
que soit le verdict, il emmènera la jeune femme en balade
pour l'après-midi, afin qu'elle se change les
idées. C'est du moins ce que lui a consenti
le docteur hier par téléphone, après il
est vrai une "âpre négociation".
Très vite arrivé à la
clinique, il trouve la chambre 23 vide.
Il se dirige vers la salle des infirmières
où là non plus, il ne trouve aucun signe
de vie.
Il arpente alors les
couloirs en quête d'une hypothétique âme
pouvant le renseigner sur le lieu où se
trouve la jeune femme. Rien. La clinique paraît
inexplicablement désertée. Il est un fait
que c'est l'heure du déjeuner, ce
qui lui semble être l'explication la plus
plausible.
- Monsieur !
Entendant une voix au
lointain qui l'interpelle, il se
retourne et voit une jeune infirmière qui s'adresse
effectivement à lui de façon certaine.
Elle affiche un sourire
radieux et ses yeux brillent d'un éclat
qui contraste avec l'aspect plutôt terne
des lieux. A mesure qu'elle s'approche de
lui, elle regarde Antoine avec une curieuse
insistance avant de le saluer chaleureusement.
Ce rayon de soleil apporte
un peu de baume au cœur d'Antoine qui voit
dans ce comportement un signe positif
quant aux nouvelles.
- Je présume que vous
venez prendre des nouvelles de votre sœur
? Lui demande la jeune infirmière.
- Euh, oui, enfin non.
Je viens aux nouvelles de la patiente
qui se trouve dans la chambre 23. Répond
Antoine surpris par la question.
- C'est ce que
je pensais. Quel charme elle a ! Ca
tient de famille, finit-elle de dire, tout
en offrant à Antoine un sourire d'une remarquable intensité.
- Euh... Vous connaissez ses
parents ? Bredouille-t-il étonné.
- Vos parents, non, mais
ça se voit tout de suite que la famille
possède un charme particulier, qui j'avoue
me fait craquer. Finit-elle.
Antoine ne comprend rien
à ce que lui dit la jeune infirmière. Il
ne cherche même pas à réellement saisir
le sens de ces mots car son esprit est ailleurs.
- Vous avez des nouvelles
? Savez-vous si elle a fini son examen ?
Je suis allé à la chambre mais il n'y a
personne. Dit-il.
- A la chambre ? Non,
bien sûr. A son réveil on l'a emmenée au centre afin
qu'elle y subisse un examen approfondi.
C'est là-bas que se passent tous les tests
de grande importance. Elle est partie à
onze heures. Et ne vous en faites pas car
je me suis bien occupé d'elle. Répond l'infirmière.
- Au centre ? Hors de
la clinique ? Demande Antoine.
- Oui, bien sûr. Le centre
se trouve à un quart-d'heure d'ici. Elle
y est allée en ambulance. Mais ne vous inquiétez
pas car c'est la procédure classique. Je
pense que dans une demi-heure elle devrait
être revenue. Dit-elle en regardant sa montre.
Venez avec moi, je vous offre
un café en attendant. Finit-elle.
Antoine la suit machinalement,
et ils se retrouvent dans une petite salle
servant probablement de lieu de décompression
au personnel de l'établissement. Elle prépare
deux cafés et commence à rassurer Antoine
quant à l'état de "la patiente de la
23".
- Ne vous inquiétez pas
inutilement car la médecine a fait d'énormes
progrès et tout demeure toujours possible.
Rassurez-vous, car nous ferons tout le possible
pour la sortir de sa pénombre. Au fait,
- poursuit-elle - Je vous ai vu à chaque
fois que vous êtes venu, mais je n'ai jamais
osé vous aborder. La timidité, sans doute.
Finit-elle par dire.
- M'aborder ? Euh...
Bafouille-t-il sans trop comprendre.
- Elle ne fait que dire
du bien de vous à qui veut l'entendre. Vous
êtes un peu son Dieu. Comme j'aimerais que mon
frère et moi ayons une complicité aussi
belle. Dit-elle, en changeant de sujet.
L'homme est perplexe
et comprend de moins en moins le discours
de la jeune femme, mais il oriente vite
la conversation sur la seule idée qui le
préoccupe.
- Vous avez vu son dossier
? Vous avez accès à toutes les données médicales
? Que pensez vous de ses chances de s'en
sortir ? Demande-t-il.
- Ecoutez, avant le résultat
de l'examen approfondi d'aujourd'hui, il
est impossible à quiconque de se prononcer.
Personne au monde n'est en mesure de savoir.
Il faut attendre et rester confiant. Ne
vous en faites pas. Finit-elle en lui prenant
tendrement la main.
Cette marque de gentillesse
touche Antoine, qui regarde alors la jeune
femme tendrement, en guise de remerciement
de sa compassion et de la délicatesse qu'elle
lui témoigne.
Cette clinique a vraiment
un personnel incroyablement attentionné,
pense-t-il, avant que les lèvres de la jeune
infirmière ne viennent se joindre furtivement
aux siennes.
- Hummm... Hé... Qu'est-ce
que ....
Interloqué, Antoine recule
sa tête tout en fronçant
les sourcils, ne comprenant décidément rien
au contexte. Ou plutôt si, il vient au moins
manifestement
de comprendre qu'il plaît à la jeune infirmière.
Mais tout de même, quel
culot ! Pense-t-il. Surtout vu le contexte,
elle est gonflée, la nana. Finit-il de
penser intérieurement, tandis que l'infirmière
s'en va lui faisant un énorme sourire ainsi
qu'un signe de la main en guise d'au-revoir.
- A bientôt j'espère.
Il faut que j'y aille. Patientez un peu
et soyez dans la chambre 23 dans une demi-heure
environ. Elle devrait s'y trouver en compagnie
du docteur. Termine l'infirmière avant
de disparaître pour de bon.
Antoine reste seul dans
la petite salle, encore surpris par la scène
qui vient de se dérouler.
Il finit tranquillement son café, et une
dizaine de minutes plus tard il commence
à se diriger vers la chambre 23, non sans
une certaine appréhension.
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